Ah ! le superbe mot pognon ! Bien en chair, franc comme l’or, rond comme une pomme : du pognon.
En outre, le terme était, vers 1840, fort expressif. Il appartient en effet à la famille du mot poing, qui signifie « la main fermée » Ce terme, il faut le reconnaître, est aujourd’hui moins usité, sauf en locution (coup de poing, dormir à poings fermés), au rebours de ses dérivés poignée et poignet. Il fut toutefois quelque peu revivifié au cours du XIXe siècle grâce à la dérivation populaire ou argotique.
La pogne, tout d’abord, d’origine dialectale, désigne la main. On appelait chez moi un député démagogue Monsieur serre- la-pogne.
Le verbe poigner, ensuite, signifiait « saisir avec le poing ». Sur ce verbe, ou plutôt sur sa variante dialectale pogner, on a formé le substantif pognon, devenu le nom populaire de l’argent. C’est ce qu’on empoigne : faire rentrer le pognon ; garder son pognon ; filer du pognon.
Toutefois le lien de pognon à poing, par le verbe pogner, s’est perdu ; le terme est aujourd’hui démotivé.
Il a rejoint la série des désignations populaires de l’argent qui ont fleuri dans la grande expansion de l’argot, entre la fin du XIXe siècle et les années 1950 : fric, flouze, fraîche, pèze, thune, blé, oseille, pépètes, etc.
Si l’on manque d’argent, on n’est pas dépourvu de termes qui le désignent.