Point de vue des économistes

La guerre du gaz en Méditerranée - Géopolitique du partage de la mer

Par Jean-Pierre ESTIVAL –  L’Harmattan  – 264 pages

Aucune nation ne peut se passer de gaz naturel.

Sur ce besoin universel où se rencontrent rareté et appétit de consommation insatiable, l’économie et l’écologie se rencontrent, se confrontent, en portant en elles d’inéluctables contradictions entre visions de court et le long terme. Il en résulte des tensions permanentes dont l’actualité se fait régulièrement l’écho. :

Les pays défavorisés du Levant veulent augmenter leurs maigres ressources en  s’appropriant entre autres le maximum de richesses gazières off-shore, ce qui entraine, pour leur partage, des conflits entre États voisins : la Grèce et la Turquie  sont en état de guerre larvée,

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Point de vue des économistes

L'avenir de l'intermédiation financière

Revue d’économie financière – AEF n° 142 – 2ème trimestre 2021 – Coordonnée par Jézabel COUPPEY-SOUBEYRAN et Vivien LÉVY-GARBOUA

La stabilité du système financier international, comme l’intermédiation financière elle-même sont confrontées depuis 2008 à des tensions inédites :    la répétition de crises majeures, les effets contradictoires des normes prudentielles qui laissent en pratique prospérer le « shadow banking » etc..

Pour maintenir la confiance face à ces transformations disruptives, les  régulateurs ont dû innover, s’éloignant d’une intermédiation centrée sur les  grands établissements dont le modèle de banque universelle parait révolu, en progressant vers des modèles plus décentralisés.

Mais comme le notent les auteurs de ce nouveau brillant collectif : « … le  scepticisme sur les capacités du système financier à se reformer sans crises majeures  est  très présent … ». Il en résulte un double point de vue :

 – soit, il convient de changer tous les modèles de gestion (politique monétaire, Banques Centrales, etc…), dans un contexte de fortes et croissantes interventions des États,

– soit , il faut s’en remettre à la capacité des innovations financières  pour : «…régénérer en quelque sorte le système …de l’intérieur … ». 

Les co-auteurs de ce numéro de la REF s’attachent à analyser les situations des différents acteurs de l’intermédiation financière, face à ces deux points de vue. 

Dans ce contexte, il apparait que le « shadow banking » est devenu une forme structurelle et très complémentaire de l’intermédiation financière de même que la gestion d’actifs qui bénéficie d’un afflux inédit de capitaux en liaison avec le niveau des taux. En Europe, précise Denis Beau, sous- gouverneur de la Banque de France : «…la préoccupation touche plus à la concentration accélérée du secteur bancaire, plutôt qu’à sa rentabilité, moins impactée qu’il n’était  craint… ». Mais, « …les  grandes machines de collecte populaire de l’épargne .. » comme l’Assurance – vie sont  grippées par la faiblesse des rendements et des  taux négatifs . Si la dérive « vers l’inflation et la « répression financière » du système financier reste « inexorable », comme le montrent Vivien Levy Garboua et Gérard Maarek, le modèle d’affaires de l’ensemble des intermédiaires financiers est mis au défi d’évoluer pour résister aux crises systémiques à venir et s’adapter aux (grands) besoins d’investissement des économies après la crise du Covid. 

 Ces visions transversales, très complémentaires et documentées qu’apportent la trentaine d’éminents contributeurs à cette parution seront très précieuses.

Pour tous publics, experts, enseignants, et étudiants. Remarquable.

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Point de vue des économistes

Islamogauchisme, Populisme et nouveau clivage Droite-Gauche

Par Philippe FABRY et Leo PORTAL – VA Éditions – 189 pages

Il n’est pas nécessaire de souligner outre mesure l’actualité du sujet de ce nouvel essai : les débats médiatico-politiques qui prolifèrent en la matière s’en sont largement chargés, tout en restant le plus souvent en surface de la réflexion que devrait appeler ce « phénomène politique ». 

Aussi l’un des grands mérites de ce duo d’auteurs, historiens et experts reconnus de ces domaines est de proposer un décryptage original de ces tendances qu’illustrent entre autres, le trumpisme, la sécession des élites, l’islamisme, l’indigénisme, la woke-culture, etc… 

L’Islamogauchisme, le populisme, et le nouveau clivage Droite- Gauche incarnent tout particulièrement ces grandes questions de politique contemporaine : 

De fait, les repères des commentateurs paraissent brouillés, le clivage droite -gauche semble de plus en plus dépassé par les leaders politiques … en parole et en pratique, et c’est sur l’avenir même de la démocratie en occident et dans le monde sur lequel on s’interroge face à une montée en puissance  du Populisme …

De fait, le libéralisme, le socialisme, l’écologisme sont-ils de Gauche ou de Droite ?, « la  révolte  des  élites  est- elle une réalité ou un fantasme ?…..convenons que les point de vue  apparaissent  de plus en plus nuancés sur  ces sujets…

 Dans cet ouvrage particulièrement bien documenté et où s’éclairent l’histoire des idées et des Institutions politiques, les auteurs proposent une grille de lecture originale qui s’appuie sur une analyse permettant d’approfondir ces grandes questions :  – la démocratie est-elle en train de s’effacer au profit de nouveaux modes de gouvernement ?  -les raisons de l’évolution continue du clivage Droite-Gauche sont- elles à chercher ailleurs que dans un simple changement de clivage (où il n’y aurait plus, « en même temps », ni droite ni gauche), mais plutôt en prenant en compte de « nouveaux clivages » comme par exemple celui qui prospère entre mondialistes et nationalistes ? 

Les auteurs ont une théorie stimulante, capable de s’appliquer : « …à toute société politique, occidentale ou non, contemporaine ou passée… » 

 Il s’agit en réalité d’une ambition, en tous points méritante, pour proposer un modèle permettant : « … d’interpréter les signaux émis par les sociétés politiques occidentales actuelles et de discerner l’avenir de la démocratie en Occident … ». Le tableau de synthèse permettant d’appréhender la dynamique historique dans les principales communautés politiques (Angleterre, USA, Russie, Turquie, Japon, associant à celui de la France ceux   de la Rome antique et d’Athènes) est tout à fait exceptionnel : il met en lumière ce mouvement sinistrogyre dont le principal moteur reste l’émergence régulière de nouvelles classes d’exclus dotés d’une conscience politique. 

Ainsi la démonstration est faite de l’hypothèse selon laquelle : « …  il y a  toujours eu et partout , ….. des Réactionnaires, des Conservateurs, des Progressistes et  des Révolutionnaires  qui constituent les bases  théoriques  classiques.  Le clivage politique se fait toujours par rapport à l’ordre social établi et ne correspond pas à un corpus de « valeurs » ni à une doctrine idéologique qui changent avec le… temps et ce changement est la conséquence d’une dynamique sinistrogyre portée par de nouvelles idéologies à l’extrême-gauche, valant doctrine à l’intégration politique des nouvelles classes « d’exclus ».

 Enfin les auteurs concluent que le débat politique ouvert et les partis à « assemblées délibérantes » ne constituent en rien une rupture de cette réalité politique permanente.

 « … l’objet de la science politique n’est pas de comprendre comment manipuler les masses humaines, mais de les aider à faire leur psychanalyse afin qu’elles puissent maîtriser leurs pulsions et apaiser leurs névroses… »

 Ce brillant essai s’inscrit sur ce chemin. Immanquable pour tous publics.

– Philippe   FABRY ,  Historien  du  droit, auteur prolifique Prix turgot  du jeune  talent 2015

– Léo PORTAL,  Doctorant en sciences politiques  de l’université de Florence 

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Point de vue des économistes

Mythe ou réalité de la souveraineté française

Favoriser le retour d’une autonomie stratégique pour notre pays au sein de l’OTAN ou de l’UE reste un objectif assez diversement partagé par la classe Politique. Mais l’évolution du contexte budgétaire de l’État, aggravé par  la crise liée aux conséquences de la Covid 19, détermine une pesanteur venant contrarier de plus en plus fortement les capacités à voir reconnues comme réalistes nos ambitions.

L’examen par le Sénat du projet de budget pour 2021 ne peut qu’interpeller en ce qu’il est écrit dans le Tome 1 du Rapport Général de la Commission des Finances au sujet des principaux équilibres (ou déséquilibres) que « l’Etat se finance désormais autant par l’endettement que par l’impôt ». Cela traduit une perte progressive d’autonomie et une dépendance croissante à nos créanciers dont nous sommes dans l’obligation, au moins implicite, de tenir le plus grand compte, ce qui ralentit et obère insidieusement notre liberté d’action. Entre 2008, année de la crise liée aux subprimes aux USA et cette année 2020, la dette de l’Etat français a plus que doublé (à+2000 milliards). Certes, son coût annuel a baissé en raison de la politique de taux d’intérêts bas menée par décision de la BCE. 

Il convient cependant de garder présent à l’esprit que la politique de création monétaire dite de quantitative easing ne peut s’inscrire dans la durée sans coûts réels quant à leurs effets immédiats comme futurs, en raison d’une alternative que l’on n’a pas encore trouvé les moyens d’esquiver :

– Soit la politique monétaire accommodante de la BCE (dans la ligne de la FED US) cesse et engendre une hausse des taux d’intérêts, et par voie de conséquences un accroissement proportionnel de la charge annuelle de l’Etat risquant de provoquer une crise financière si elle intervient brutalement ;

– Soit cette politique est durablement prolongée et engendre alors un regain d’inflation venant alléger la charge annuelle de l’Etat, mais avec pour contrepartie une perte sensible de pouvoir d’achat affectant plus particulièrement les épargnants, et en particulier les retraités, mais aussi l’équilibre du commerce extérieur renchérissant les importations à dû proportion.

 En  résultent  deux questions incontournables :

– Combien de temps semblable politique peut durer ?

– Quelles conséquences en termes de souveraineté induit cette dépendance à ses créanciers (pour l’essentiel étrangers, et non nationaux comme dans le cas de la dette japonaise) ?

En 2021, il est prévu que l’Agence France-Trésor émette comme en 2020,260 milliards d’euros d’emprunts pour la charge de la dette, ce qui correspond à un montant équivalent aux recettes fiscales nettes de l’Etat. En comparaison avec la période d’avant la crise de 2008 évoquée plus haut, le montant des OAT émises était équivalent à la moitié des recettes fiscales.

Les limites que nous déplorons au sujet des moyens affectés aux secteurs dits souverains (défense, santé, sécurité, justice etc. ) trouvent leur origine dans ce déséquilibre des finances publiques.   Cette situation assourdit notablement  et simultanément la portée de la voix de la France et sa capacité à se faire entendre, y compris au sein de l’UE Aussi  le rétablissement des finances publiques est une nécessité de défense, et une exigence de  notre souveraineté

La diminution du stock de dettes est nécessaire pour parer à la survenance d’une nouvelle crise, mais aussi à la cohésion interne de notre société. La solidarité intergénérationnelle pan fondamental de l’action publique dans le domaine social nous y invite aussi car les jeunes générations sont celles auxquelles demain appartient, et c’est pour l’assurance des lendemains que les efforts de défense sont consentis.

Or, c’est sur les jeunes générations que repose le paiement de dépenses qu’elles n’auront pas choisies. Elles devront acquitter des impôts qu’elles n’auront pas consentis.

De la sorte, la solidité de l’assise des politiques de défense auxquelles est étroitement liée à l’équilibre de nos finances publiques, et l’effet de puissance dont dépend leur crédibilité puise aussi à cette source. 

Si l’UE et l’adoption de l’euro ont évité une crise monétaire qui se serait traduite par une perte de près de 50% de la valeur de notre monnaie, la rupture du pacte relatif à la limitation des déficits budgétaires entraîne des tensions entre Etats dont il serait dangereux de sous-estimer les conséquences.

Ne manquons pas de tirer quelques leçons de l’Histoire aux débuts de la Vème République, pour corriger les méfaits d’une hausse des prix de 15% en une année, a été créé le nouveau Franc (plan Pinay-Rueff) refondant des bases de finances assainies. Notre pays put ainsi, grâce au retour d’un équilibre économique sain, mettre en œuvre une politique qui en rétablit la pleine capacité d’être entendu en raison des moyens d’une puissance assurée.

Le calendrier électoral offre la perspective de pouvoir inscrire dans les programmes politiques cette ambition. Il est temps de tenir un langage de vérité pour éviter que s’amplifie encore la fracture du pays.De cette exigence qui demande le « sacrifice du court -terme » dépend largement notre souveraineté.

Jean-Louis CHAMBON

Président Fondateur du Cercle Turgot

Marcel JAYR

Ancien Secrétaire Général de la Fédération Nationale des Dirigeants Salariés FNCDS

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Point de vue des économistes

Le libéralisme économique au milieu des Tempêtes

Par Jean-Pierre ESTIVAL – L’Harmattan – 240 pages

Après avoir été accepté, à contre cœur, comme le « pire des modèles à l’exception de tous les autres » pendant les années fastes et glorieuses, le libéralisme est à nouveau  assailli de toutes parts : « le Communisme est mort mais pas la pensée Marxiste », les illibéraux prospèrent, les insoumis agitent  la « nouvelle pensée économique »,  tandis que Keynes retrouve avec la crise pandémique de nombreux adeptes, dénonçant le concept d’un marché autorégulateur et appelant de leurs vœux une intervention majeure et pérenne de l’État salvateur.

Enfin les théoriciens de l’écologie « pour qui le capitalisme est à l’origine de tous les maux de la planète ont  trouvé un prompt renfort dans les thèses de ceux qui considèrent que le libéralisme a  poussé à brader aux  « … pays émergents l’essentiel de nos  activités stratégiques et sanitaires…»  Bref, « le mondialisme heureux » paraît avoir vécu.    

Aussi  dans ce contexte, cette nouvelle parution de Jean-Pierre ESTIVAL, politologue, économiste, et auteur de  talent, arrive à point nommé  pour ouvrir la réflexion sur la nécessité pour le libéralisme de se redéfinir, à défaut de se réinventer et de s’ouvrir plus complètement aux besoins sociétaux  du «  nouveau monde ». Pour l’auteur, c’est « l’entreprise » qui doit devenir le moteur de  cette évolution par le passage d’un  « capitalisme d’actionnaires » à un « capitalisme de stakeholders », c’est-à-dire d’un meilleur partage des responsabilités entre l’ensemble des acteurs  économiques, autrement dit des parties prenantes. Ainsi propose-t-il, à travers une argumentation particulièrement documentée passant en  revue les principales théories libérales et les critiques qui les accompagnent, les pistes pour un libéralisme économique plus inclusif, pour la nécessaire reconquête des souverainetés nationales ainsi que celles qui touchent à l’évolution du commerce international. Au fil des pages, on mesure l’immense défi que représente cette indispensable ( ?) révolution idéologique : comme le pensait l’économiste Tyler Cowen : 

«… il faut démontrer sans cesse et toujours qu’un monde plus libre est un monde meilleur pour le plus  grand nombre … »

Les remises en cause engendrées par la crise pandémique sont sans doute de nature à permettre  d’avancer radicalement dans ce sens, peut être sur les pas des pratiques du modèle singapourien : 

« la démocratie à la base, l’expérience au milieu et la méritocratie au sommet »

Quelques leçons liées au coronavirus et une esquisse du monde d’après, précieuses tant pour la  réflexion que pour la pédagogie économique et accessible à tout public.

Jean-Pierre ESTIVAL, politologue, Docteur d’Etat en sciences  économiques, auteur primé par la 32e édition  du Prix Turgot est enseignant et expert sur les sujets des ex-PECO et le Moyen Orient.

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